20/05/2023
Repères éthiques sur la déprogrammation : Synthèse
La Conférence Nationale des Espaces de Réflexion Ethique (CNERER) a constitué un groupe de travail sur le thème de la « déprogrammation » et nous en présentons ici la synthèse. La réflexion a commencé à un moment où la cinquième vague de la pandémie a pu faire craindre une nouvelle surcharge des services hospitaliers. Même si ce débordement n‘est finalement pas survenu la poursuite du travail nous a semblé pertinente pour trois raisons. D’une part le contrôle actuel de la pandémie offre le temps et le recul nécessaires à une démarche de réflexion éthique. D’autre part la déprogrammation de prises en charge des patients précédait et se poursuivra au-delà en raison des faiblesses chroniques du système de santé que la pandémie a exacerbées. Enfin l’expérience vécue doit être exploitée pour corriger les difficultés rencontrées et anticiper les potentielles crises sanitaires à venir.
D’une part le contrôle actuel de la pandémie offre le temps et le recul nécessaires à une démarche de réflexion éthique. D’autre part la déprogrammation de prises en charge des patients précédait et se poursuivra au-delà en raison des faiblesses chroniques du système de santé que la pandémie a exacerbées. Enfin l’expérience vécue doit être exploitée pour corriger les difficultés rencontrées et anticiper les potentielles crises sanitaires à venir.
Le titre même de déprogrammation soulève des questions. Il peut paraitre trop réducteur, négatif et technique mais il a l’avantage de la clarté et d’une relative facilité de compréhension même si les questions soulevées sont plus complexes qu’il n’y parait. La pandémie a provoqué une réduction de l’offre de soins, une réflexion sur les priorisations dans l’accès aux soins y compris pour l’accueil des urgences, et la déprogrammation de prises en charges qui avaient été fixées. Nous verrons que ces trois aspects sont difficiles à séparer et génèrent des situations problématiques pour les patients et les soignants.
Nous avons rencontré une première difficulté lors de la recherche de données chiffrées sur les déprogrammations qui sont difficiles à obtenir, non spécifiques, mal adaptées au temps de crise et parfois peu robustes. La perte de chance est le fondement des risques de toute forme de déprogrammation ou de réduction de l’offre de soins et nous avons jugé utile d’approfondir cette notion sur le plan juridique et sociétal. Le vécu et les réflexions des usagers du système de santé nous ont semblé indispensables à notre démarche. Le rapport de la Conférence Nationale de Santé « Les droits des usagers en santé à l’épreuve de la pandémie de COVID 19 publié en Juin 2021 a donc été analysé et complété par une audition de représentants de France Assos Santé.
Les repères et les conditions de la réflexion éthique en santé, les valeurs du soin doivent guider les décisions des professionnels et des gestionnaires alors que le contexte de crise et d’urgence aurait tendance à les effacer face à une pure recherche d’efficacité.
Dans le dernier chapitre nous avons regroupé des propositions pour corriger les anomalies observées pendant la pandémie COVID et les rendre plus appropriées et plus acceptablesNotre volonté est surtout de rappeler l’objectif commun et primordial du souci de l’autre dans notre
système de santé et de l’hôpital comme bien commun accessible à tous selon ses besoins. Déroger à cet idéal ne peut découler que d’une démarche collégiale.
En effet l’analyse des déprogrammations nous a montré les risques de leur banalisation et de leur
réduction à une procédure administrative imposée par les circonstances et dispensant de réflexion et de considération humaine. Or les déprogrammations portent atteinte aux droits des patients, au code de déontologie et aux valeurs et principes du soin : ces écueils doivent être corrigés pour l’avenir.
Mais que le lecteur ne cherche pas ici l’exposé de procédures organisationnelles ou techniques : elles relèvent de la responsabilité des acteurs, l’Etat et ses représentants en région, les gestionnaires d’établissements et les professionnels de santé avec leurs sociétés savantes sans oublier les instances représentant les usagers.
La CNERER, en diffusant largement ces réflexions, et les Espaces de réflexion éthique régionaux en les relayant dans leurs formations, peuvent contribuer à les intégrer dans les pratiques.